Histoire d'eau

Nos débuts

Cette histoire débute en l'an de grâce 1993... ou 94, je ne sais plus, bref ça fait un bail. On avait tous les deux cette petite flamme aquariophile qui brûlait en nous silencieusement et qui ne demandait qu'à grandir. Alors quand on s'est rendu compte qu'on avait autant l'un que l'autre envie d'un aquarium à la maison (un 3 pièces pourri à l'époque) on s'est dirigé vers la première animalerie qu'on connaissait (celle de la Placette à Chaux-de-Fonds, CH) et on s'est lancé dans ce qui devait allait devenir un carnage organisé d'êtres vivants à la gloire du Dieu Aquarium Trop Petit 1er du nom.
Je profite de cette page pour faire publiquement mes excuses à la grande famille des poissons à laquelle nous avons cruellement arraché quelques membres, sacrifiés sur l'autel de notre ignorance.
Notre premier aquarium ne mérite en fait même pas le nom d'aquarium, ni même de bocal. C'était en fait une chose à l'esthétisme douteux, une sorte de récipient d'à peine 5 litres, triangle posé sur sa tranche et tenu en équilibre par un support en plastique noir. Tiens, il faudrait que je fasse un tour à la grange pour voir si je retrouve la chose et que je la prenne en photo (en passant outre la honte qui me pétrit, afin d'éduquer les futures générations d'aquariophiles).
Sans le savoir, nous étions en train de mettre en scène des joutes romaines dans notre mini Colisée triangulaire. Les gladiateurs répondaient aux noms de Betta splendens, Cardinalis, Poecilia reticulata... Et moi qui avait songé baptiser nos poissons des doux noms de Luxe, Calme et Volupté, ce que j'avais sous les yeux, c'était plutôt Surpopulation, Incompatibilité et leur rejeton légitime: Issuefatale.

Nombreux sont ceux qui ont eu un aquarium une fois dans leur vie et qui ont essuyé des pertes et des déceptions. Pour tous ceux-là il y a ce fameux moment charnière où on se dit: stop ou encore? Nous, on a dit encore et on a filé s'acheter un aquarium digne de ce nom, d'un volume de 100  litres, avec un équipement correct. A ce moment-là, tapi dans l'ombre de l'abdomen d'une de nos femelles guppy, sommeillait déjà l'alevin qui allait nous rendre irrémédiablement aquariophiles.

Le premier bébé est une vraie surprise, un émerveillement. On le découvre caché sous une feuille, puis on le perd, on le retrouve derrière une racine, puis on le perd encore... pour de bon. Mais la vie ressemble parfois aux feuilletons américains où les morts ne sont pas tout à fait morts et où ils réapparaissent au détour d'un nettoyage de filtre. Et hop, on récupère le miraculé avant qu'il ne disparaisse dans les méandres des tuyaux d'égouts et on le rend à l'amour des siens, qui en fait ont toujours autant envie de le becqueter.

Les rencontres

La suite est faite de rencontres. A une époque ou le Web n'était pas la première source d'information à laquelle on pensait (eh oui, souvenez-vous ce n'est pas si loin), le meilleur moyen pour parler poissons c'était de faire partie d'un club aquariophile. C'est au club de La Chaux-de-Fonds que nous avons côtoyé pour la première fois certaines éminences grises de l'aquariophilie en Suisse. Des anciens qui partagent leur savoir sans compter, des jeunes fous qui partagent leur passion. Et comme tout apprentissage comporte ses rites de passage, nous avons dû passer par l'épreuve de la paramécie du chou rouge, que nous avons remportée avec les honneurs et les odeurs!

Et il y a eu quelques voyages avec l'ARCAT, de nouvelles découvertes et des rencontres marquantes. Nous avons un jour débarqué avec toute une équipe d'aquariophiles Suisse romands chez le regretté Jean-Claude Nourissat dans la sud de la France. Chez lui le poisson était roi, il était partout, même dans la piscine. On avait l'impression que si on laissait traîner son verre d'eau, on l'aurait retrouvé un peu plus tard avec un guppy nageant dedans. Entre les poissons de Monsieur et les plantes de Madame, nous avons voyagé d'un coup sous les tropiques. Et je vous raconte pas la taille des araignées endémiques du Sud de la France qui s'aventuraient avec bonheur dans ce paradis, elles en doublaient de volume. Une fishroom avec des étages de bacs dédiés aux Cichlidés. Dans le jardin, des bottes de pailles placées en carré et couvertes d'une bâche en plastique, c'était l'élevage de guppies. Nous, avec nos quelques aquariums à la maison, qui faisions déjà figure d'illuminés pour nos proches, nous avons pu mesurer ce que l'on peut accomplir quand on vit à fond pour sa passion. Et c'est gonflés à bloc et des projets pleins la tête que nous sommes rentrés de ce voyage.

à suivre...